lundi 11 juillet 2011

Louisa Necib Joue-la comme Zizou


Portrait Tout juste sacrée championne d’Europe avec l’OL, la meneuse de jeu Louisa Necib, souvent présentée comme une Zidane au féminin, dispute la Coupe du monde avec les Bleues en ce mois de juillet. Par Thomas Goubin

Comme lui, elle est née à Marseille. Comme lui, elle a façonné son élégante technique dans la rue. Comme lui, elle la met au service des meilleurs collectifs. Comme lui aussi, elle regarde de l’autre côté de la Méditerranée, vers l’Algérie, le pays de ses parents. Comme lui, sa famille lui importe plus que tout. Enfin, comme lui, elle suscite l’admiration de ses pairs et du public. Ce n’est pas pour rien qu’on la surnomme la “Zidanette”.
A 24 ans, Louisa Necib a déjà 55 sélections en équipe de France et rayonne dans l’entre-jeu des Bleues, comme au cœur de celui de l’Olympique lyonnais, le meilleur club français. Le 26 mai, à Londres, deux jours avant le Barça de Messi, l’OL est même devenu le meilleur club d’Europe en emportant, face à Potsdam (2-0), la Ligue des champions, celle après laquelle la section masculine continue de courir.
Pour terminer en beauté cette saison à succès, Louisa Necib s’apprête à disputer sa première Coupe du monde. Elle se déroulera en Allemagne en ce mois de juillet. “Ce tournoi génère beaucoup d’excitation, confesse-t-elle d’une voix posée, presque timide, car c’est la plus belle des compétitions et aussi parce qu’il s’agit d’un saut dans l’inconnu.” La France ne s’est qualifiée qu’une seule fois en Coupe du monde, mais les Bleues constituent bien une valeur montante sur un marché mondial dominé par le Brésil, les Etats-Unis, et l’Allemagne. “On a beaucoup progressé, confirme le numéro 10 de la sélection, mais on ne peut pas non plus dire qu’on est candidates au titre. Il faudra déjà sortir des poules.” Autant dire qu’imiter Zidane, en offrant sa première Coupe du monde à la France, relève de l’exploit.

Soutenue par ses parents
Pour Louisa Necib, tout a donc commencé dans les rues de Marseille. Elle y joue avec les garçons, sans être épiée par l’œil médisant du conformisme. “J’étais très complice avec eux, j’étais très bien acceptée, se rappelle-t-elle. Enfant, il y a peu de différences morphologiques, et je n’ai jamais été victime de moqueries.” A 14 ans, la jeune fille apprend qu’elle peut s’engager en club. Repérée lors d’un match qu’elle dispute avec la Ligue Méditerranée contre l’équipe de France, elle intègre le centre de formation de Clairefontaine à 17 ans, là où se retrouve l’élite. Louisa Necib sera footballeuse.
“J’ai eu la chance d’être toujours soutenue dans mes choix par mes parents, reconnaît-elle. Pour ma mère, c’était dur de me voir partir si jeune. Pour mon père aussi, sans doute, mais il le montrait moins.” Son début de carrière professionnelle l’aidera à se rapprocher du domicile familial. D’abord à Montpellier, en 2006, où elle effectue des débuts canon : 11 buts en 20 matches. Puis à l’Olympique lyonnais, la grosse écurie du football féminin, qui l’engage au terme de sa première saison.
Elue meilleure joueuse de l’année du championnat de France en 2009, ses performances attirent l’attention des recruteurs. Mais Louisa reste. “Je suis très famille”, justifie-t-elle. Dans un club qui vient de réaliser un quintuplé, trustant tous les titres depuis 2005, la jeune femme se dit certaine de pouvoir “encore progresser”.
Si pour un joueur de foot, la Premiere League ou la Liga sont deux championnats qu’il faut jouer et remporter absolument, pour une joueuse, il en est un très compétitif et plus rémunérateur de l’autre côté de l’Atlantique, aux Etats-Unis. Là-bas, le football se nomme soccer et il offre les meilleurs salaires de la planète.
Plusieurs joueuses françaises ont déjà succombé à la tentation. “Moi, ça ne me dit rien”, tranche la meneuse de jeu. Il faut dire aussi qu’être salariée de l’OL offre un certain confort sur lequel les autres clubs ne peuvent pas s’aligner. La rémunération moyenne des filles a été évaluée à 4 000 euros. Loin, très loin des salaires à six chiffres de Gourcuff, Lisandro et consorts, mais de quoi vivre tout de même de sa passion. Louisa Necib “n’envie pas” ses collègues masculins, plus populaires et plus riches qu’elle. “On les côtoie, on les supporte, comme eux le font quand on joue en Ligue des champions, et en aucun cas on les jalouse.”
Une fille presque comme les autres
La Marseillaise ne croit pas que le foot féminin gagnera un jour en notoriété. D’autres n’ont pas hésité à tomber le short et le maillot, pour médiatiser leur sport. En 2009, quelques joueuses de l’équipe de France avaient posé nues pour un calendrier. “Moi, j’ai préféré ne pas poser”, indique le numéro 10 des Bleues, qui, balle aux pieds, fait déjà beaucoup pour la promotion de sa discipline. Un métier prenant qui l’empêche de concrétiser ses envies d’Algérie : “Ma mère et ma sœur y vont tous les étés. Moi, je ne peux pas.” Elle ne peut pas non plus consacrer beaucoup de temps à sa licence STAPS éducation et motricité. La footballeuse, fille d’une Oranaise et d’un natif de Tissrat, aime néanmoins “faire les magasins, se promener, aller au cinéma, comme n’importe quelle fille”.
Française d’origine algérienne, Louisa Necib a été touchée par la polémique sur les quotas. Mais elle préfère garder son opinion pour elle. Une réserve qui rappelle, là aussi, celle Zidane. Constamment comparée au héros de la Coupe du monde 1998, Louisa Necib apprécie-t-elle le parallèle ? “Ma référence, comme la plupart des Français, c’est Zidane. Je l’ai rencontré lors d’un rassemblement de l’équipe de France, cela s’est très bien passé.” Elle n’en dit pas plus. Discrète. Comme lui.

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